La rupture conventionnelle est, avec le licenciement et la démission, l’une des manières de mettre fin à un CDI. Elle implique le consentement de l’employeur comme du salarié, alors que le licenciement et la démission sont à l’initiative d’une seule des deux parties. Pour le salarié, cette procédure est considérée comme avantageuse, car elle permet d’obtenir une indemnité de rupture conventionnelle et l’ouverture potentielle de droits au chômage. Comme nous le verrons, l’employeur peut lui aussi avoir à gagner à mettre fin au CDI de cette manière. Mais avant toute chose, revenons aux bases et voyons en pratique quand et comment faire une rupture conventionnelle.
Rupture conventionnelle : les grands principes
Rappelons d’abord que la rupture conventionnelle est réservée aux CDI. Un salarié en CDD peut mettre fin à son contrat d’un commun accord avec son employeur, mais cela ne rentre pas dans le cadre de la procédure de rupture conventionnelle.
Ensuite, le point essentiel à retenir est que la rupture conventionnelle est une rupture de contrat à l’amiable. Le salarié et l’employeur se mettent d’accord pour mettre fin au CDI et le consentement libre et éclairé de chacun doit pouvoir être démontré. La proposition de rupture conventionnelle peut venir soit du salarié, soit de l’employeur, mais doit ensuite être acceptée par les deux parties, qui négocient ensemble les conditions du départ.
D’autre part, notons qu’il peut s’agir d’une procédure individuelle ou collective. Les ruptures conventionnelles collectives sont initiées par l’employeur, dans le but de remplir des objectifs de suppression d’emplois sur la base du volontariat, sans devoir recourir à un licenciement économique. Nous y reviendrons !
LES CHIFFRES :
Créée en 2008, la procédure de rupture conventionnelle rencontre année après année un succès croissant. En 2023, on a dénombré 515 365 ruptures conventionnelles en France. À titre de comparaison, on a enregistré environ 900 000 licenciements et plus de 2 millions de démissions sur cette période. (source : Dares / Mouvements de main d’œuvre)
Quand est-il possible de mettre fin à un CDI par rupture conventionnelle ?
La rupture conventionnelle est possible dès lors que le consentement des deux parties est avéré. Ce consentement doit être libre et éclairé : il ne doit pas être obtenu en faisant subir des pressions ou menaces au salarié, ou en lui cachant des informations. Si cette condition est remplie, la rupture conventionnelle peut avoir lieu au cours d’une période de travail normale, mais aussi lorsque le contrat est temporairement interrompu pour maladie, accident du travail, congé parental ou congé sabbatique.
Elle peut aussi intervenir lorsque l’entreprise rencontre des difficultés économiques. En revanche, elle ne doit pas être utilisée pour contourner les garanties prévues pour les salariés lors d’un licenciement économique, comme le reclassement (ou outplacement). De plus, elle n’est pas possible lorsqu’un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) ou un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE) sont en cours.
Préavis, indemnités, chômage : quelles sont les suites d’une rupture conventionnelle ?
L’indemnité de rupture conventionnelle
À l’issue de la procédure, le salarié perçoit une indemnité de rupture conventionnelle et ce, quelle que soit son ancienneté. Le montant minimal de l’indemnité est calculé en fonction de l’ancienneté. Il doit être au moins égal au montant de l’indemnité légale (ou conventionnelle) de licenciement.
CONSEIL D’EXPERT :
Pour calculer le montant minimum brut ou net de l’indemnité de rupture conventionnelle, vous pouvez utiliser ce simulateur mis à disposition par l’administration.
Par ailleurs, si le salarié n’a pas encore pris tous les congés qu’il a acquis au moment de la rupture du contrat, il reçoit une indemnité compensatrice de congés payés.
Rupture conventionnelle et chômage
La rupture conventionnelle ouvre des droits au chômage pour le salarié dès lors qu’il remplit les conditions fixées par France Travail (ex Pôle emploi). Une fois inscrit sur la liste des demandeurs d’emploi, il peut potentiellement percevoir l’allocation d’aide au retour à l’emploi (ARE).
Y a-t-il un préavis à respecter ?
Aucun préavis n’est prévu en cas de rupture conventionnelle. L’employeur et le salarié se mettent simplement d’accord sur une date de fin de contrat. Celle-ci doit prendre en compte les délais incompressibles liés à la procédure : délai d’instruction de la demande d’homologation et délai de rétractation. Il faut généralement compter 1 à 2 mois pour finaliser une rupture conventionnelle.
Rupture conventionnelle d’un CDI : la procédure à suivre
La demande peut être effectuée par l’employeur ou par le salarié, soit à l’oral, soit par écrit. Aucun formalisme n’est imposé. Il faut également noter que ni l’employeur, ni le salarié n’ont l’obligation de répondre à la demande qu’ils reçoivent.
Nombreux sont les salariés qui se demandent combien de fois un employeur peut refuser une rupture conventionnelle. Il n’existe aucune limite en la matière : l’employeur peut ignorer ou refuser les demandes autant de fois qu’il le souhaite. Et il en est de même pour le salarié !
En revanche, une fois la demande acceptée, la procédure de rupture conventionnelle doit suivre un formalisme strict, sous peine de sanctions. Plusieurs étapes doivent être respectées.
Étape 1 : l’entretien préalable de rupture conventionnelle
Le code du travail impose la tenue d’au moins un entretien entre le salarié et l’employeur afin de définir et négocier les conditions du départ. La convention de rupture peut être rédigée à la suite de cet entretien, ou bien être signée par les deux parties au cours de l’entretien. Le salarié a la possibilité de se faire assister pendant la rencontre ; si c’est le cas, l’employeur pourra lui aussi se faire assister.
Étape 2 : la rédaction de la convention de rupture conventionnelle
Une convention de rupture conventionnelle doit ensuite être rédigée. Cette démarche s’effectue en ligne sur le site TéléRC, ou en remplissant la version papier du formulaire Cerfa n°14598. L’employeur peut joindre des annexes (ex : clause de non-concurrence) au formulaire de base. La convention est ensuite téléchargée et signée par les deux parties, qui conservent chacune un exemplaire.
Étape 3 : le délai de rétractation
Un délai de rétractation de 15 jours calendaires est prévu. Il débute le lendemain de la signature de la convention. Si la fin des 15 jours tombe un samedi, un dimanche, un jour férié ou chômé, le délai est prolongé jusqu’au 1er jour ouvrable.
L’employeur et le salarié ont tous les deux le droit de se rétracter au cours de cette période, sans devoir invoquer un motif. Leur décision doit être notifiée à l’autre partie par lettre recommandée avec accusé de réception, ou remise en main propre contre décharge.
Étape 4 : l’homologation administrative
Pour que la rupture conventionnelle soit effective, il faut obtenir une homologation officielle par la DDETSPP (Direction départementale de l’emploi, du travail, des solidarités et de la protection des populations). La convention lui est adressée soit via le service en ligne TéléRC, soit en envoyant le Cerfa n°14598 par courrier, de préférence en recommandé avec accusé de réception.
La DDETSPP dispose ensuite d’un délai de 15 jours ouvrables à partir du lendemain de la réception de la demande pour vérifier la validité de la convention. Sans réponse de sa part pendant cette période, la convention est homologuée. Dans le cas contraire, la convention doit être révisée. Pendant cette période, le salarié continue à travailler normalement.
Étape 5 : fin du contrat et versement de l’indemnité de rupture conventionnelle
Une fois la date de fin de contrat arrivée, le salarié quitte l’entreprise. L’employeur doit alors lui verser les salaires et primes dus, l’indemnité de rupture conventionnelle, ainsi que l’éventuelle indemnité de congés payés.
Il lui remet également plusieurs documents :
1. Certificat de travail.
2. Attestation France Travail (ex Pôle emploi).
3. Reçu pour solde de tout compte.
4. État récapitulatif de l’ensemble des sommes et valeurs mobilières épargnées dans le cadre des dispositifs de participation, d’intéressement et plans d’épargne salariale au sein de l’entreprise.
Une procédure spécifique pour les salariés protégés
La procédure de rupture conventionnelle est différente pour les salariés protégés (membres élus du CSE, représentants syndicaux…). Elle est d’abord soumise à l’approbation du CSE (comité social et économique). Une fois cet avis obtenu, l’employeur et le salarié peuvent signer le formulaire de demande d’autorisation de rupture conventionnelle d’un salarié protégé, c’est-à-dire le Cerfa n°14599*01. Le service en ligne TéléRC ne peut pas être utilisé. La convention doit ensuite recevoir non pas une homologation de la DDETSPP, mais une autorisation de l’inspecteur du travail.
La procédure de rupture conventionnelle collective
Comme nous l’avons évoqué, une rupture conventionnelle collective est un accord collectif visant à réduire l’effectif de l’entreprise sur la base du volontariat plutôt qu’à travers un licenciement économique. L’employeur s’engage à ne procéder à aucun licenciement économique pendant la période de recours au volontariat. L’accord collectif détermine le nombre maximum de départs envisagés, les conditions que doit remplir le salarié pour en bénéficier, ainsi que les modalités de calcul des indemnités de rupture.
Deux conditions doivent être remplies :
1. Le montant de l’indemnité ne peut être inférieur à celui qui serait dû en cas de licenciement économique.
2. Des mesures d’accompagnement et de reclassement des salariés doivent être mises en place (notre guide des services d’outplacement globaux peut vous y aider).
Pour mettre en œuvre la procédure, l’employeur doit informer la Dreets (direction régionale de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités) de l’ouverture d’une négociation pour la conclusion d’un accord collectif portant rupture conventionnelle collective. Cette démarche s’effectue sur le portail Rupco. La Dreets dispose ensuite d’un délai de 15 jours à compter de la réception de l’accord pour le valider ou le rejeter.
Comment négocier une rupture conventionnelle ?
Accord à l’amiable ne rime pas forcément avec absence de négociations. L’employeur et le salarié ont tout intérêt à discuter pour conclure une convention satisfaisante pour les deux parties.
Les points de négociation concernent notamment :
1. Le montant de l’indemnité de rupture conventionnelle. Celle-ci est soumise à un seuil minimal, mais son montant peut être plus élevé.
2. La date de fin de contrat. Elle peut être négociée en fonction des projets personnels du salarié, ainsi que de l’avancée des travaux dans l’entreprise.
3. Les dispositions concernant les congés payés acquis. L’employeur peut par exemple avoir intérêt à ce que le salarié les pose plutôt que de devoir lui verser une indemnité compensatrice.
Rupture conventionnelle : les avantages pour l’employeur
Si les avantages de la rupture conventionnelle pour le salarié sont évidents, ils peuvent être plus difficiles à cerner pour l’employeur. Celui-ci peut préférer éviter de devoir verser une indemnité de rupture conventionnelle au salarié en ne lui laissant d’autre choix que de démissionner. Mais est-ce vraiment la bonne décision ? L’employeur peut bel et bien trouver son compte dans une rupture conventionnelle.
D’abord, il faut garder à l’esprit qu’un salarié démotivé ou mal à l’aise au travail risque de se montrer moins productif, ce qui a un impact direct pour l’entreprise. Une nouvelle recrue enthousiaste et dont le profil correspond parfaitement au poste peut faire la différence.
Ensuite, la rupture conventionnelle permet de maintenir de bonnes relations avec le salarié jusqu’à la fin de son contrat, et même après. Cela facilite la passation, qui est généralement plus fluide et efficace dans ce cas de figure. Bien sûr, accepter la rupture conventionnelle est aussi une manière de témoigner de la reconnaissance de l’entreprise pour le travail effectué. De plus, il ne faut pas oublier que vos anciens salariés continuent d’être des ambassadeurs pour votre société. S’ils sont satisfaits de leurs conditions de travail et de départ, ils en parleront autour d’eux, ce qui profite à l’image de l’entreprise.
La rupture conventionnelle peut aussi être envisagée dans des situations moins évidentes. Elle peut permettre de désamorcer des conflits et d’éviter un contentieux plus lourd, tout en présentant l’avantage de la rapidité.
Rupture conventionnelle : les points à retenir
Terminons en rappelant les enseignements clés de ce tour d’horizon :
1. La rupture conventionnelle implique un consentement libre et éclairé de l’employeur comme du salarié. Celui-ci peut se retourner contre l’employeur s’il estime avoir subi des pressions.
2. Choisir la rupture conventionnelle plutôt que d’imposer une démission peut bénéficier à l’employeur à différents niveaux, notamment en cultivant un climat positif dans l’entreprise.
3. La rupture conventionnelle n’exclut pas l’accompagnement des salariés et la recherche de reclassement, en particulier s’il s’agit d’une procédure collective. En tant qu’employeur ou représentant des RH, il est bien sûr possible de vous faire aider pour mettre en place cet accompagnement. N’hésitez pas à en discuter avec les experts Careerminds !
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Comment demander une rupture conventionnelle ?